Ce que dit Jung :
Il parle d’abord de la notion du vieil
homme sage qu’on trouve dans le Zarathustra
de Nietzsche ( la rencontre de Zarathoustra avec l’homme sage )
Il
y ramène le mythe sumérien à des concepts nietzschéens qui sont, selon
Jung des archétypes. ‘ l’ aigle, le serpent, les opposés, le surhomme etc… En
plusieurs endroits de ses commentaires.
Par exemple, Jung parle
notamment de l’inspiration de l’homme à s’élever dans les airs, de la
transformation mythique de l’homme en oiseau : Il évoque alors le récit
epique de Gilgamesh que nous possedons en écriture cunéiforme. Dans ce récit se
trouve un lieu , une sorte d’Hadès où il y a des oiseaux qui se nourissent de putréfactions.
Cela réfère selon au
« corps subtil » qui ne peut se nourrir de nourriture solide
mais de « nourriture super substantielle ». Dans la légende du Saint Graal, c’est le Cygne qui évoque ce concept.. Dans la « suspension »,
la crucifixion apparaît comme le
martyr du corps pour la transformation en corps subtil. On trouve une symbolique analogue dans l’Edda,
dans le passage ou Odin invente les Runes.
Mais c’est à propos de l’aigle et
du serpent, symbolisme nietzchéen qu’il fait surtout la comparaison.
Gilgamesh est au deux tiers humain
et pour un tiers de nature divine. C’est une sorte de surhomme ayant un
extraordinaire (tremendous) pouvoir
spirituel. Pour créer sa capitale, Uruk
, il y fait travailler les hommes réduits
à l’esclavage . Les femmes du temple des prostituées s’en plaignent aux
Dieux et c’est ainsi que les Dieux créent
Enkidu un contrepoids à Gilgamesh.
A propos d’Enkidu , il est à noter
que Jung dit que nous ne sommes pas sûr de ce terme. Certains savants
traduisent ce terme par « Izdubar » d’autres par « Eobani »
(nom de l’ancienne capitale de l’Arménie antérieur à Ourartou ) Quoiqu’il en soit, Enkidu représente une
nouvelle création des dieux. Il boit la
même eau que les gazelles. Il vit et se nourrit avec les bêtes. Il est une
sorte d’homme inférieur mais de force égale.
Il représente la partie la moins noble de la psyché. On peut
dire que dans la mesure. où Gilgamesh représente la volonté, la conscience,
l’attitude spirituelle, Enkidu
représente lui, l’ombre de Gilgamesh, la partie la moins évoluée du
psychisme. Ce que Jung rapporte au plan physique : la partie sympathique du système nerveux, la
moelle épinière, pas le cerveau. Il représenterait la qualité motrice dans
l’aspect corporel de la psyché.
Par contre en opposition à
Gilgamesh, Enkidu est terriblement
émotif et sujet à des intuitions. Il souffre, il a des rêves intuitifs.
Dans un passage du récit épique, il y a un
moment ou Gilgamesh met Enkidu
en sommeil pour le faire rêver et savoir à partir de son rêve par quel
moyen ils parviendront à venir à tuer le géant Khumbaba qui surveille la
montagne où demeurent les Dieux. Gilgameschi lui même a des rêves intuitifs et
c’est par l’un d’entre eux qu’il cherche à dépasser (overcome) son ombre.
Cette métaphore signifie que la volonté, la conscience,
finissent par dépasser la partie inférieure de l’esprit ( the lower mind) .
C’était pour les contemporains une question fondamentale.
Ce mythe est extrêmement ancien et
apparaît au VII ième siècle avant J C dans le récit épique de Gilgamesh
découvert dans la dite bibliothèque d’Assur –bani- Pal. ( au British Museum) Il
date de plus de 3000 ans avant JC, avant Hammurabi le grand
legislateur (law giver) de Babylone.
Jung fait aussi un rapprochement complexe avec les signes du
Zodiaque, les Jumeaux le Cancer et le
Taureau,. ( voir ma communication à partir du texte de Solange de Mailly Nesle dans un précédent mail) Ce dernier signe (environ 4200 avant J-C)
représente le printemps de la conscience avec l’apparition de l’écriture.
Jung montre que la continuité
dans la mémoire est absolument nécessaire pour assurer la valeur
de la conscience. Sans cette dernière il n’y a plus de possibilité de
jugement faute de ne pouvoir comparer. (A ce niveau , Jung fait dans son
séminaire une longue digression sur la
psychologie sénile.)
4000 environ avant J C, c ‘est l’apparition du « Gilgamesh epic » c’est à dire de
la possibilité de l’intention, de la volonté, de l’énergie , de disposer de la
libido.
Mais cela offense les dieux qui se
vengent et tentent de briser cet hybris (promethéen ou luciférien.)
C’est la raison de l’invention de
la figure d’Enkidu, ce qui signifie qu’un conflit est né que personifie
Gilgamesh entre l’esprit ( the mind)
qui s’élève vers les hauteurs et la partie inférieure de l’homme , Enkidu.
Pendant un temps Gilgamesh et
Enkidu font ensemble des exploits. Mais
Enkidu souffre de plus en plus d’être
sous le joug de la volonté supérieure ( le rêve qu’on voit dans la septième tablette) . La traduction du
texte qui fut faite en allemand d’abord
est la suivante en anglais:
« Why have the great gods come together in council ? Why
are they planning my path? Oh friend, it was a pecular dream which I saw and
its end foretold misfortune. An eagle took me with iron claws and flew
upward for for hours; Then he said to
me : “Look down upon the earth, what seeth you? Look down upon the sea, how
doth he appears to thee?...” And when Gilgamesh heard the words of Enkidu his
looks became dark and he said to Enkidu his friend : “A evil spirit will take
thee with his claws, woe unto thee, the great gods have decided upon
misfortune. Lie down because thy head is hot…. ”
[J’ai abrégé le texte qui est
beaucoup plus long ] Nous y trouvons
dit Jung , cette symbolique :
La partie inférieure de l’homme
est prise dans des griffes de fer de la conscience et emporté dans les
airs puis lâché et
tué. Comme un aigle qui
lâche sa proie. Enkidu peut être
représenté comme un serpent parce que le serpent est la concrétisation de la
psyché inférieure (avec une moelle épinière et peu de cerveau) Tandis que
l’aigle est une représentation du cerveau.
Après la mort d’Enkidu, Gilgamesh ressent terriblement sa perte.
Il est comme de la conscience
seulement.
C’est aussi ce que nous ressentons dans notre civilisation dit
Jung , qui rappelons le, donne ce séminaire
à la veille de la Seconde Guerre Mondiale. La perte du corps. Maintenant
Gilgamesh réalise la crainte de la mort. Il veut atteindre Utnapishtim
le fondateur de la vie eternelle.
La peur de la mort est aussi
une caractéristique de notre civilisation.
Gilgamesh reçoit
d ‘Utnapishtim l’herbe de la
vie éternelle ( le pharmakon athanasias) qui guérit de la crainte
de la mort ( ce que signifie aussi
l’ hostie dans la communion de l’église chrétienne)
Mais tandis qu’il dort, le serpent
lui vole le pharmakon. C’est la vengence d’Enkidu. Gilgamesh demeure maintenant dans la terre. ( The earth , seized him not the Plague, God )
Conclusion : Ce qui est posé
c’est l’énorme problème de l’origine de la conscience car la civilisation n’est pas autre
chose qu’une intensification de la conscience et l’accroisssement de la conscience ajoute l’auteur est une
menace pour tous.
Sommes- nous à l’aube d’un retour
à Enkidu, au corps à l’animalité ? Comme dit Berlioz tout le monde sait qu’il
n’ y a de vrai que le ciel . Mais si le ciel n’était pas vrai, il resterait
la musique.